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Monika Rittershaus / OnP

Opéra

Nouveau

Bérénice

Michael Jarrell

Création mondiale

Palais Garnier

du 29 septembre au 17 octobre 2018

1h30 sans entracte

Bérénice

Palais Garnier - du 29 septembre au 17 octobre 2018

Synopsis

Titus, qui aimait passionnément Bérénice, la renvoya de Rome « malgré lui, et malgré elle », raconte Suétone. De ce récit fameux, Racine fit le coeur d’une tragédie sans égale, Bérénice, dont la simplicité d’action constitua l’un des enjeux d’écriture. Titus et Bérénice s’aiment, tentent et refusent de se comprendre sous les yeux d’Antiochus, amoureux sans espoir. En se saisissant aujourd’hui de la « tristesse majestueuse » de ces alexandrins, parmi les plus grands vers de la langue française, Michael Jarrell magnifie la puissance des mots et en fait le vecteur d’identités et d’espaces sans cesse questionnés, de Rome à Jérusalem.

Durée : 1h30 sans entracte

Langue : Français

Surtitrage : Français / Anglais

Artistes

Création mondiale

D’après Jean Racine

Équipe artistique

Orchestre de l’Opéra national de Paris

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  • Réglé comme du papier à musique

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L’alexandrin en douze points

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Petite histoire du vers le plus célèbre de la littérature française

06 min

L’alexandrin en douze points

Par David Christoffel

À l'occasion des représentations de Bérénice, David Christoffel s’est interrogé sur l’alexandrin, ce vers qui a hanté pendant des siècles la littérature française. Une enquête en compagnie du compositeur Michael Jarrell et Valérie Beaudoin, membre de l’Oulipo.    

1.

Dans la voix de Sarah Bernhardt déclamant les vers de Phèdre de Racine, on peut entendre le vibrato avec l’ampleur troublante d’une comédienne enragée à servir son rôle. On peut aussi relever un équilibre inouï entre la rigueur métrique et la hargne à donner pleine vie à la folie du personnage qui s’acharne dans l’ardeur d’un amour interdit.    

2.

Certains journalistes de l’époque y ont même entendu un cas spectaculaire d’autohypnose, comme le rapporte aujourd’hui la musicologue Céline Frigau Manning. La puissance de l’alexandrin ne tient pas seulement dans la force incantatoire du vers régulier, elle est aussi dans l’opulence des couleurs vocaliques. Car, au-delà du décompte des syllabes, la métrique est aussi question de choix des voyelles. 

3.

La voix de Sarah Bernhardt peut aussi s’entendre comme l’emblème d’une époque où le phonographe ne pouvait imprimer les voix que si les comédiens ou les chanteurs faisaient un effort de projection. Une époque où l’emphase était le prérequis de la déclamation et qui peut trouver aujourd’hui quelques survivances dans certains slams.

Dans la voix de Julien Delmaire, on peut entendre une volonté d’arracher sa langue du parler quotidien, un désir de souffle continu ou une quête de dignité poétique, pour ne pas dire de nouvel académisme. 

4.

Avant le slam, avec des motivations autres et tout aussi variées, un poète mathématicien s’est inquiété de restaurer l’alexandrin. En oulipien, Jacques Roubaud tient la contrainte pour un potentiel et le « vers libre » pour un oxymore. Dans La Vieillesse d’Alexandre (1978), il distingue trois types d’attaque du vers : « atteinte au principe de continuité (derniers textes de Rimbaud, Corbière), atteinte aux principes de la concordance de la syntaxe à la métrique (faits d’“enjambement” et de “rejet”), atteinte à l’identité des segments constitutifs du vers (hémistiches)1 ».

5.

Mais pendant que Rimbaud mettait la Beauté sur ses genoux pour la trouver amère et l’injurier, les métriciens continuaient de débattre à savoir si la régularité des alexandrins n’est qu’une question de nombre des syllabes ou des pieds. De même que la musique gagne à ne pas laisser le rythme se réduire à une question de durées des notes, la poésie promet de beaux développements en s’apercevant que la métrique n’est pas réductible au rythme.    

6.

Pour pouvoir compter jusqu’à douze, il faut une sorte d’alarme sonore : la rime. Louis Becq de Fouquières lui donne pratiquement statut de métronome : « La rime est la caractéristique de l’unité de mesure ; c’est elle qui clôt, par un effet d’acoustique, le temps expirateur. L’oreille, qui compte les chocs qu’elle reçoit et qui groupe ses sensations acoustiques, est ainsi avertie que les douze sons du vers sont écoulés et que la période mélodique est terminée2. »

7.

L’idée est contestée par Victor Delaporte qui, en contre-exemples, rappelle quelques alexandrins dont la beauté d’alexandrin fait plaisir à entendre, sans faire intervenir le charme de sons répétés. Ainsi : « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire », « J’aime le son du cor, le soir, au fond des bois3 ».

8.

Quel pourrait bien être alors le critère d’un bel alexandrin ? Faut-il qu’il puisse donner grâce aux formules dodécasyllabiques du quotidien, telles « Monsieur le Président Directeur Général » ou « Attention à la marche en descendant du train ».    

9.

Plus régulière est la métrique, plus menaçante est la moulinette. La belle musique des vers risque de passer dans la mauvaise musique : « Les lecteurs se font aux rimes brillantes ou simples ; si les vers sont bons, ils admirent tout en bloc. Mais, de grâce, ne leur causez point la désagréable surprise de rimes misérables au beau milieu de rimes choisies et sonores. Cela produit juste l’effet d’une superbe sonate de grand maestro, moulue par un orgue de Barbarie dont le cylindre est garni de dents cassées : cela détonne, cela crie, cela agace4. »

10.

Quand, en 1988, Roubaud fait un marquage de ponctuation sur les 1000 premiers vers de Bérénice, il cherche « à identifier la structure rythmique de l’alexandrin et voir son organisation interne de façon statistique et globale », explique Valérie Beaudouin, pour qui « le vers régulier n’a de valeur que parce qu’il est entouré de vers qui le sont moins ».     

11.

Comme le rythme se joue aussi dans la répartition des voyelles, il faut transcrire Racine en alphabet phonétique (le vers « Cet amour est ardent, il le faut confesser[1], » devient « (s ɛ)(t a)(m u r)(ɛ)(t a r)(d ã t)(i l)(l ə)(f o)(k ɔ̃)(f e)(s e) ») pour mettre des chiffres sur la richesse sonore offerte par la variété vocalique des différentes syllabes. La thèse de Valérie Beaudouin[2] a pu aller jusqu’à montrer, par exemple, que 12% des vers ont un « a » en 1ère position, 16% en 5è position et seulement 8% en fin de premier hémistiche. Ces calculs sur l’ensemble des pièces de Racine a permis de vérifier que le vers régulier est donc un instrument de relief, « de même que, dans la structure du vers, les positions qui sont marquées sont marquées parce que leurs voisines sont atones. »

12.

L’ambition de Valérie Beaudouin était en effet d’« identifier les relations entre structures rythmique et structure sémantique ». Ce travail statistique a pu mettre en évidence que, sur l’ensemble des pièces de Racine, le vers est beaucoup plus régulier autour du pôle de la mort qu’autour du pôle de l’amour. Autrement dit, l’amour fait perdre stabilité dans la prosodie.    


1. Jacques Roubaud, La Vieillesse d’Alexandre, Paris, Ivréa, 2000 [1978], p. 38.
2. Louis Becq de Fouquières, Traité général de versification française, Paris, Charpentier, 1879, p. 29.
3. Cité par Victor Delaporte, De la rime française : ses origines, son histoire, sa nature, ses lois, ses caprices, Lille, Desclée, de Brouwer et Cie, 1898, p. 25.
4. Victor Delaporte, op. cit., p. 173.
5. Racine, Bérénice, vers 421.
6. Valérie Beaudouin, Mètre et rythmes du vers classique. Corneille et Racine, Paris, Honoré Champion, 2002.    

© Monika Rittershaus / OnP

À part l’amour

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Ou n’y rien comprendre

13 min

À part l’amour

Par Nathalie Azoulai

Titus n’aimait pas Bérénice. C’est le titre du roman qu’offre Léonie à l’hôtesse d’un dîner entre amis. Un titre énigmatique soulevant bien des passions et embarquant les convives dans un débat échauffé. C’est aussi le titre d'un roman de Nathalie Azoulai qui, dans une habile mise en abyme, fait revivre les héros de la tragédie racinienne. On connaît le dilemme de Titus : choisir Bérénice ou la raison d’État. Devoir et désir sont au cœur de cette nouvelle échappée. L’auteur, s’inscrivant dans la lignée du dramaturge, continue de sonder les vertiges de l’amour. Pur, intéressé ou couvert de sang, il prend mille formes, se perdant même dans les abîmes d’un songe.


Sur le palier du quatrième étage où elle arrive essoufflée, Léonie a juste le temps de remettre en ordre ses cheveux d’une main, tandis que de l’autre, elle constate qu’il est presque 22 heures. Elle lisse encore sa frange, sa jupe, respire profondément puis se décide à sonner. La porte s’ouvre, elle sourit.

- Désolée, mais j’ai loupé mon train, j’ai dû attendre le suivant, tu sais que je ne suis jamais en retard, comme je déteste ça, je suis confuse… J’aurais voulu t’apporter des fleurs mais j’ai sauté dans un taxi et je n’ai trouvé que ça, dit-elle en tendant un paquet-cadeau rectangulaire. Je ne sais pas ce que ça vaut, je ne l’ai pas lu, mais le titre m’a amusée…

- Allez, entre, tout le monde est là, on n’attendait plus que toi, répond l’hôtesse.

C’est exactement ce qu’elle redoutait, arriver la dernière dans le grand salon aux murs vert céladon où, sur le canapé en u, chacun aurait déjà pris place auprès de sa chacune, devant les verres, le champagne, les olives, les tomates-cerises, les amandes... Soudain se déroule en même temps qu’elle avise chaque visage une irrépressible liste de mets apéritifs, les tranches de saucisson, les gressins, le tarama, la tapenade, l’anchoïade, ici, les apéritifs sont toujours extrêmement copieux, songe-t-elle, variés, sans cesse ravitaillés, parfois interminables. Salut Léonie, ça fait longtemps, comment vas-tu ? Si elle voyait déjà la scène depuis le quai de la gare, les couleurs, les regards levés vers elle et les sourires, elle en entendait aussi les paroles, les mêmes depuis plus de quinze ans. Et Léon ? Encore en voyage ? Mais elle ne s’en offusquait pas, c’étaient là ses vieux amis, tous connus pendant ses années de droit, des couples stables, soudés, parfaitement ajustés, chacun emboîté dans sa chacune, jusqu’aux prénoms appariés, d’une symétrie proche de la magie ou de la blague. Paul et Paule, Louis et Louise, Jean et Jeanne, Charles et Charlotte, Léonie et son Léon, quand il n’était pas en mission à l’autre bout du monde. Sans parler de l’hôte et de l’hôtesse qui poussaient le zèle jusqu’à s’appeler Claude et Claude et qu’on fondait dans un prénom exceptionnellement mis au pluriel lorsqu’on disait qu’on dînait chez les Claudes car, disposant du plus grand salon dans l’appartement le plus équidistant de tous les autres, immanquablement, c’étaient toujours eux qui recevaient. Hormis l’arrivée tardive de Léonie, ses cheveux en bataille et son souffle encore un peu court, on était ici au cœur d’une œuvre classique, la salle d’un château dix-septième, un plateau de marquèterie, une esthétique absolument parfaite jusque dans les moindres détails. J’arrive là comme un cheveu sur la soupe, se dit Léonie en avançant vers les canapés, un grain dans la machine, une ombre au tableau, un accroc dans le tissu, une… reprise par son syndrome de liste qu’elle n’avait encore jamais subi à ce point et qu’elle devait à sa gêne, quand soudain l’hôtesse annonça en ouvrant le paquet :

- Alors, voyons, de quoi s’agit-il ?

Un silence d’autorité entraîna l’un après l’autre les dix regards vers l’objet découvert.

- Titus n’aimait pas Bérénice, énonça Claude, aussitôt suivie d’un « tiens donc », proféré en écho par la voix de l’autre Claude.

- N’importe quoi ! dit Jean sans attendre.

- Pourquoi ? demanda Jeanne.

- C’est ne rien comprendre aux dilemmes qu’impose la raison d’Etat, dit Paul.

- Ou ne rien comprendre à l’amour, répliqua Paule.

- On peut aimer et devoir renoncer à cet amour, dit Louis.

- Sauf que dans la vie, on fait en général ce qu’on veut le plus, opposa Louise.

- On passe à table dans cinq minutes, glissa l’hôtesse en s’éloignant et en déclenchant par son départ des prises de parole encore plus vives.

- Ce n’est pas vrai, on fait aussi ce qu’on peut, et Titus ne peut affronter la colère de tout un peuple, dit Jean.

- Il veut la gloire plus que l’amour, c’est là que va vraiment son désir, dit Paule.

- Mais c’est ne rien comprendre au bien public ! lança Charles. Vous parlez comme si une nation n’était rien.

- D’autres s’en seraient chargés à sa place du bien public, les empereurs meurent et se remplacent, l’histoire ne manque pas d’exemples, observa Louise.

- C’est à cause de Paulin, je n’ai jamais aimé Paulin, c’est un oiseau de malheur, déclara Charlotte.

- C’est lui la raison d’Etat, heureusement qu’il est là, reprit Paul.

- Je déteste Paulin, répéta Charlotte, comme en proie à un souvenir mauvais et personnel.

- Qu’est-ce qu’il t’a bien fait ? se moqua Charles.

Abasourdie, Léonie s’assit et songea que jamais les arguments qui s’abattaient sur la table basse n’avaient été plus sexués, les hommes défendant Titus et les femmes Bérénice, et plus semblables à une pluie de chromosomes qui seraient soudain devenus des créatures parlantes. Elle constata qu’au premier mouvement de son esprit qui s’était d’abord abrité derrière la litanie rassurante et verticale des listes s’ajoutait désormais celui d’un tournoiement plus horizontal, plus anarchique et plus évolutif, capable de se transformer en ronde folle et déplaisante. Si elle avait su, elle aurait choisi un roman policier, un livre de cuisine, un manuel consacré au bonheur, à l’estime de soi, au contentement intérieur, à l’harmonie majeure, etc.

Puis l’hôtesse reparut et, d’une voix posée, ordonna de passer à table. Une vague de calme nappa la table quelques minutes puis, quand tout le monde fut assis et après quelques regards suspendus, la querelle reprit.

- Qui ici a déjà dû choisir entre l’amour et autre chose ? demanda Louis.

- Moi, quand j’ai divorcé de Léa pour épouser Jeanne, dit Jean.

- Moi, quand j’ai renoncé à mon poste au Brésil puisque Louise ne voulait pas y aller, dit Louis.

- Moi, quand j’ai accepté de m’installer ici, dit Paul.

- Moi, quand j’ai refusé de me présenter à l’élection, dit Charlotte.

- Ne compare pas, répliqua Paul.

- Ça n’a rien à voir, renchérit Louis.

- Mais pourquoi ? s’insurgea Paule. C’est exactement la même chose !

- Titus hérite d’un empire, reprit Louis, son père vient de mourir, il n’a pas le choix, il doit reprendre, c’est Rome tout de même ! En plus, il a eu une jeunesse dissolue, il doit se racheter.

- C’est classique, avec la mort de son père, il devient adulte et responsable, renchérit Jean.

- La vraie question est, est-ce que ça lui en coûte ? lança Jeanne.

- Evidemment ! répondit Paul.

- Bien sûr mais… nuança Louis.

- Je vous rappelle qu’il tient à peine deux ans, précisa Charles, ensuite il meurt de la peste.

- La peste soit des menteurs ! tempêta Charlotte.

- On dirait que c’est toi que Titus a quittée, se moqua Paul.

- Mais pendant ces deux ans, est-il obsédé par celle qu’il a perdue ? demanda Jeanne.

- Comment le savoir ? poursuivit Charlotte.

- Moi, je suis certaine qu’il ne regrette rien, qu’il n’a pas voulu la revoir et qu’il a fait exactement ce qu’il a voulu le plus, remarqua Louise.

- C’est rarement une question de devoir, plus souvent une question de désir, renchérit l’hôtesse qui, jusque-là, s’était bien gardée de prendre part au débat, s’en tenant plutôt à des remarques sur la cuisson du saumon et les divers accompagnements possibles.

Du fait de cette intervention grave et posée, Léonie eut le sentiment qu’un nouveau cap avait été franchi, et se mit à considérer son retard comme une faute irréversible aux conséquences tragiques. Nom de Dieu, pensa-t-elle, pourquoi ne pas avoir demandé au taxi de s’arrêter pour acheter une bouteille de vin ? Elle y avait pensé mais elle avait non seulement eu peur d’aggraver son retard mais aussi d’avoir les mains trop tremblantes pour ne pas lâcher la bouteille dans les étages. Ce dîner devenait proprement invivable. Elle regarda ce qui restait du grand saumon sur le plat et se mit à imaginer chaque intervention comme une longue arête tranchante : on se fusillait du regard, les remarques devenaient de plus en plus acides, on se levait même pour aller fumer à la fenêtre, le tout dans un concert de bruits de couverts de plus en plus heurtés. Au milieu de cette agitation nouvelle, elle constata que seule Charlotte restait inerte et triste, comme empêtrée dans des mouvements intérieurs bien plus tempétueux que les phrases qu’elle lâchait de ci de là.

Puis soudain, la voix de basse de Charles tonna :

- Mais c’est incroyable, vous êtes vraiment tous dupes !

- Dupes, ah oui et de quoi ? demanda Paule.

- De Bérénice, de ce soi-disant grand amour de femme. Vous êtes tous victimes des magazines féminins ! Tous, quel que soit votre sexe.

- Mais heureusement, tu vas nous éclairer, persifla Louis.

- Titus était sa dernière chance, reprit Charles, Bérénice a passé la quarantaine quand leur liaison commence, elle a dix ans de plus que lui.

- Et alors ? risqua Paul.

- Et alors, elle compte aussi sur Titus pour se refaire une stature, l’histoire l’a malmenée, elle est veuve, elle a défendu son peuple mais elle est en perte de vitesse et doit plus ou moins partager la couronne avec son frère. Epouser Titus et Rome, ce serait pour elle une consécration.

- Tu insinues que son amour est intéressé ? Qu’elle est encore plus avide de gloire que Titus ? se hérissa Jean.

- Bien sûr !

- Comme s’il y avait des amours désintéressées, glissa Paule.

- Mais je déteste ce que tu dis, rétorqua Charlotte.

- Pourquoi ? s’étonna Charles. Paule n’aimerait pas Paul sans son poste au tribunal, son prestige, ses médailles de tennis. Louise n’aimerait pas Louis sans son nom de héros américain, Jean n’aimerait pas Jeanne sans ses premiers prix de conservatoire…

- Et toi, Charlotte, tu n’aimerais pas tant Charles s’il ne... s’interrompit Paul.

- Si quoi ? le coupa Charlotte si violemment qu’il n’acheva pas.

- L’amour n’est jamais pur, il se pare, il s’habille, il s’orne, reprit Charles. Appelle ça de l’intérêt si tu veux, pour moi, ce sont les qualités qui font qu’on aime quelqu’un, telle personne plutôt que telle autre, qu’on la trouve unique sinon à quoi bon ?

Ces considérations générales sur l’amour commençaient à sérieusement fatiguer Léonie. Elle préférait encore le fiel d’une querelle au miel pontifiant de ceux qui savent et abreuvent les autres de leurs certitudes. La seule chose qui la consolait, c’était que l’hypothèse de Charles avait rendu les arguments sexuellement indifférenciés. Tous s’érigeaient avec la même virulence contre son interprétation. L’hôtesse emporta le plat de saumon et l’hôte empila les assiettes sales. Elle voulut les aider mais on lui fit comprendre de rester à sa place. Les Claudes revinrent avec un plateau de fromages, du pain et une pile d’assiettes propres qu’ils distribuèrent lentement autour de la table comme à un goûter d’enfants.

- Eh bien, figurez-vous que moi aussi je dois choisir entre l’amour et autre chose, dit soudain l’hôtesse en se mettant à couper du pain sur une planche.

Tous les regards se tournèrent vers elle d’un air stupéfié puis terrifié, avisèrent son visage calme puis descendirent le long de ses bras dans l’espoir d’y trouver un indice ou un trouble. Sa main, le couteau, on s’attendait à ce qu’elle tremblât, se blessât, inondât la table de son sang, que le bain de sang qui couvait depuis le début de ce dîner, qui retenait ses bouillons, ses effusions, à coup de phrases argumentées, courtes et cinglantes, se libérât enfin par sa main. Mais non, elle découpait le pain en tranches parfaitement égales et sans le moindre tremblement. Puis quand elle fut venue à bout de l’ensemble de la miche, elle déposa les tranches une à une dans la corbeille. Son bras suspendit ensuite longtemps la corbeille pleine au milieu de la table tandis que ses yeux évitaient ceux de son mari. On aurait prié pour que la lumière s’éteigne à cet instant, qu’on n’ait pas à assister à un tel affront et, dans un afflux de pitié et de terreur, chacun ficha son regard dans celui de sa chacune. A l’exception de Léonie qui n’eut d’autre choix que de fixer les yeux de Claude qui erraient d’un visage à l’autre. Mais comme le bras qui avait porté le coup se baissa enfin, les yeux de Claude aussi se baissèrent. Il n’y eut pas un mot, pas un cri, nulle invective et l’hôtesse ressortit du salon comme pour aller chercher du pain supplémentaire. Sauf que cette fois, elle ne reparut pas. On entendit le bruit de la porte d’entrée qui claqua et ce fut tout.

En s’éveillant, Léonie se sentit légèrement triste mais se consola en constatant qu’elle avait dormi quasiment tout le trajet et que son train arrivait en gare sans aucun retard. Elle se réjouit du dîner qui l’attendait et se souvint du cadeau qu’elle avait trouvé in extremis à la gare de Bordeaux. Un livre au titre surprenant et qui ne manquerait pas d’amuser la galerie.

Podcast Bérénice

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"Dansez ! Chantez ! 7 minutes à l’Opéra de Paris" - en partenariat avec France Musique

07 min

Podcast Bérénice

Par Nathalie Moller, France Musique

Avec « Dansez ! Chantez ! 7 minutes à l’Opéra de Paris », nous vous proposons des incursions originales dans la programmation de la saison à la faveur d’émissions produites par France Musique et l’Opéra national de Paris. Pour chacune des productions d’opéra et de ballet, Nathalie Moller pour le lyrique et Jean-Baptiste Urbain pour la danse, vous introduisent, avant votre passage dans nos théâtres, aux œuvres et aux artistes que vous allez découvrir.  
  • En partenariat avec France Musique

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Quelle musique pour Bérénice ?

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Entretien avec le compositeur Michael Jarrell

06 min

Quelle musique pour Bérénice ?

Par Marion Mirande, Simon Hatab

Avec Bérénice de Racine, c’est un monument de la littérature française qu’a choisi de mettre en musique Michael Jarrell pour la nouvelle création mondiale commandée par l’Opéra national de Paris. Comment se saisir aujourd’hui de la tristesse majestueuse de ces alexandrins ? Que peuvent encore nous dire sur l’état du monde les héros raciniens ? Ce sont là quelques-unes des questions que nous avons posées au compositeur.    

En tant que compositeur, quel rapport entretenez-vous avec la langue française chantée ?

Michael Jarrell : Complexe. Lorsqu’en 1994, j’ai créé mon opéra Cassandre, j’avais décidé que le rôle principal serait parlé. Chaque fois que les mots d’un livret se présentent à moi, je me demande comment les faire chanter. Pour moi la règle de base en français est que la dernière syllabe est celle accentuée. Or, cette règle ne fait pas l’unanimité. J’en discutais avec un musicologue qui me contredisait. En réalité, cette règle d’accentuation paraît flottante, contrairement à l’allemand ou à l’anglais, par exemple. Le français a quelque chose de mou, comme un chewing-gum.

À une époque, j’avais entendu de petits opéras composés sur des livrets de Georges Perec, dans une langue très quotidienne. Je les avais trouvés insupportables. Le français parlé a quelque chose de très terre-à-terre. On raconte l’action sans jamais être dans l’action. On est là pour écouter, comme à l’église. C'est pour cette raison que j'ai été attiré par un texte en alexandrins : je retrouvais dans cette langue classique une distance nécessaire pour la faire chanter. Sinon on se contente d’accompagner les mots sans éclairer leur sens d’une manière nouvelle.
     

Les vers de Racine possèdent une musicalité très forte. Lors de la composition, cette musique de la langue entre-t-elle en tension avec la vôtre ?

M. J. : L’alexandrin impose un certain rythme. Il fallait me libérer d’une forme de répétition, du corset dont Racine habille ses mots. Je devais rendre ces vers les plus contemporains possible, les inscrire dans un présent. Avec Racine, j’avais encore cette sensation d’être en dehors de l’action, hors du moment présent. Il me fallait éloigner cette langue du « on raconte », pour entrer davantage dans l’action. Pour autant, je n’ai pas voulu casser la langue de Racine. Je pense l’avoir respectée. C’est un exercice périlleux que de s’emparer de ce monument de la langue française. Il faut s’éloigner prudemment de ce qu’a figé en Bérénice l’histoire littéraire pour offrir au public une approche nouvelle de ce texte. Une fois ce travail sur l’alexandrin réalisé, j’ai trouvé que le texte racinien laissait beaucoup de place pour accueillir la musique.

Ivan Ludlow (Antiochus) et Michael Jarrell au cours d’une répétition de « Bérénice »
Ivan Ludlow (Antiochus) et Michael Jarrell au cours d’une répétition de « Bérénice » © Elena Bauer / OnP

Après avoir connu une éclipse jusqu’à la fin du XIXe siècle, Bérénice est aujourd’hui l’une des tragédies de Racine les plus jouées. Avez-vous en mémoire des mises en scène qui vous auraient particulièrement marqué ?

M. J. : J’ai vu deux versions de Bérénice. La première était un film adapté par Jean-Claude Carrière avec Carole Bouquet, Gérard Depardieu et Jacques Weber. Ce film a le mérite de poser une question : comment dire l’alexandrin aujourd’hui ? Il y a un passage du film qui m’a beaucoup intéressé, lorsque Carole Bouquet dérape et sort de ses gonds. Il me semble que c’est ainsi que l’alexandrin est le plus audible. J’ai également vu une captation de la mise en scène qu’avait faite Klaus Michael Grüber de Bérénice à la Comédie-Française il y a une trentaine d’années. Il y avait une prise de position très forte par rapport à la langue. Je dois dire que le travail de Grüber a contribué à me donner envie d’écrire cet opéra.

Connaissiez-vous les chanteurs qui porteraient les rôles ?

M. J. : J’ai composé le rôle de Bérénice en pensant à Barbara Hannigan que j’avais vue dans Written on Skin et dans Pelléas et Mélisande. Quand Bérénice entre en scène, elle est assez calme, stoïque. Elle pense que tout se passe comme elle le souhaite. Lorsqu’elle découvre qu’il n’en est rien, ça devient assez acrobatique, virtuose. À la fin, tout se calme, comme si tout redevenait poussière et cendres. Quant à Bo Skovhus, j’avais déjà travaillé avec lui, pour Siegfried, nocturne, sur un texte d’Olivier Py. C’est une bête de scène. Le rôle de l’orchestre peut être de ponctuer, d’accompagner ces personnages qui luttent en permanence contre leurs sentiments qui menacent de les submerger. J’aimerais que la musique soit parfois comme une vague, un tsunami qui emporterait tout sur son passage.

Vous avez également décidé de recourir ponctuellement à l’électronique…

M. J. : Oui. L’idée de l’électronique est venue peu à peu. Je voulais que le peuple murmure, qu’il revienne régulièrement, qu’il prenne de plus en plus de place : ce sont les « on dit », la voix qui résonne à l’extérieur du palais, la pression palpable qui s’exerce sur Titus.
    

Bérénice présente des personnages pétris d’idéaux et de compromis. Pensez-vous que ces héros, pris dans un conflit entre le devoir et les sentiments, peuvent encore nous toucher aujourd’hui ?

M. J. : Mon rapport au personnage de Bérénice a beaucoup évolué au cours de l'écriture. Au début, j'étais touché par sa pureté. Par la suite, plus je travaillais, plus je ressentais à son égard une forme de dégoût. Je la trouvais manipulatrice. C'est normal : elle est née à la cour, c'est une femme politique qui a un mode de fonctionnement politique. Et puis, il y a ce moment très fort chez Racine où elle comprend que Titus l'aime vraiment, qu'il l'abandonne non parce qu'il ne l'aime plus ou par soif de pouvoir, mais parce que leur histoire ne pourra jamais connaître de fin heureuse. À ce moment-là, je crois qu'elle change de ton et c'est ainsi que s’achève la tragédie, par cette impossible équation : elle aime quelqu'un qu'elle ne peut plus avoir. In fine, c’est Titus qui me fait le plus de peine alors qu’au départ, je ne l’aimais pas. Finalement, à la mort de son père, lorsqu’il doit endosser le costume de l’homme d’État, il se retrouve perpétuellement sous pression, assailli de toute part : par Bérénice, par le peuple, par Paulin, par le Sénat… Au fond, tout cela est peut-être une grande parabole sur le passage à l’âge adulte…    

© Monika Rittershaus / OnP

Une dernière sueur

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À la hauteur du théâtre

12 min

Une dernière sueur

Par Claire Berest

Sous l’Empire Romain, l’amour s’oppose à la raison d’état. La Nation convainc Titus de préférer son peuple à la passion qui l’unit à Bérénice. Sous la Ve République française, pouvoir et sentiments continuent de cohabiter en terrain in-tranquille. Jeux de politique et politiques de jeu s’entremêlent pour mieux brouiller les pistes. L’écrivain Claire Berest plonge dans l’arène et entraîne son lecteur dans la course d’une fulgurante ascension. Celle d’un Titus épris de pouvoir et d’une Bérénice guerrière et amoureuse. Leurs destins semblaient écrits, mais au sommet, la vie dépasse bien souvent la fiction… 


La première fois que Titus vit Bérénice, il fut désorienté par sa beauté in-tranquille. Les hommes politiques se méfient des passions, elles sont un ennemi trop farouche. Il faut choisir la passion de soi pour ce métier puisque l’autre risque d’être imprévisible, l’autre met au défi de ne pas être écrite à l’avance, pas de fiche pour le sang trop fort ni de bristol pour les angles circonflexes de l’âme.

La première fois qu’il la vit, il était alors en pleine ascension, il était pour un temps l’homme prometteur, matois, retors, cerveau supérieur en vêtement populaire. Bérénice avait un port de reine, un corps ouvrant en grand vers les choix impossibles et sourd à la routine des lacs pauvres, un sourire si ébranlé qu’il se donnait comme un fruit d’été éphémère.

ELLE venait de rien, elle s’était fait TOUTE. Journaliste politique, sauterelle trop gracieuse dans cette nuée qui poursuit l’être public avec l’acharnement d’une ombre pour le pénétrer, le prendre en défaut, le cas échéant le soutenir, le détruire s’il le faut. Le contre-pouvoir.

Pour Titus, amoureux de la routine des médias, la présence de Bérénice, grâce et intelligence magnétique, réduisit au silence intérieur l’essaim bourdonnant des cartes de presse goudronnées aux sceaux ordinaires.

Les gens ne disaient pas de lui qu’il était bel homme. Ils ne disaient pas non plus qu’il était remarquable, ni même charismatique. Tôt dans sa carrière, il avait pâti d’une méfiance instinctive envers ce sourire pâle qu’il portait devant la nation, un sourire plus dessiné que vivant, accroché comme un accessoire utile en bas de sa figure ronde. Il appartenait au paysage politique depuis trop longtemps, sujet déjà marqué d’un échiquier sans fantaisie, il y avait acquis une place, sa place, la sienne, diable, sans faire une ombre réelle aux excités du premier rang, semblait-il. Il comptait dans l’équation : référence, opposition, parole, contre-parole. Affaires de mots et de discours. Il s’était hissé au rang des héritiers possibles aux horizons accidentels, des seconds couteaux à l’influence tout de même primordiale, il avait écarté les exaltés populaires, gentiment, sans se départir de ce sourire affable épinglé avec calme. Il avait caressé le pouvoir. Comme on le fait du genou si doux d’une femme trop ébaubissante jusqu'à se risquer à monter brutalement la main en suivant la courbe.

Il avait donc une belle carrière. Puis ce fut un petit désert, il était jeune encore. Il avait roussi ses cartouches, mouillé la poudre trop vite, fait quelques choix, discutables, malheureux, mal à propos. Décalé en coulisse par des plus beaux et des plus forts, il était tombé de l’échiquier. Tout nu, éprouvé, comme éveillé d’un long tunnel de démocratie rêvée, où les combats successifs avaient savonné l’idéal pour se travestir en intrigues décapitées. Titus était essoré. Fini. Il avait été maire. Député. Il avait dirigé un parti.

Mais un parti n’est pas la France.

Et Titus prit conscience, avec la fièvre de l’homme qui ne s’est jamais permis de tomber malade, que s’il n’avait pu épouser la France, la femme, il l’avait couchée dans son lit, et Bérénice valait bien un pays.

Alors on lave plus bleu que blanc, on se détourne des manuels bien écrits, parce que Bérénice fait transpirer, chaude salée, une seule seconde pour un toujours. Comment peut-on louper cela ? Comment peut-on sciemment prendre le chemin si droit quand celui de traverse a le goût du ciel d’averse ? On reste un homme ; même quand le costard désiré a éduqué la colonne vertébrale. Un homme, pas grand chose, mais ce possible si infime de dire : « Ta voix, ta chevelure, ta gorge de sirène intolérable, ta verve, pour un instant, un si petit instant, annihile les efforts et fruits de trente ans. Ne t’arrête pas. Ni de parler. Ni de vivre, Bérénice. Vis pour mon plaisir, un instant, un si petit instant, si ténu, Bérénice, qu’il n’existe pas. »

Titus quitte sa femme, c’est PUBLIC.

Titus se permet. Il fait dans la transgression. Il s’accommode. On casse la palette de la perfection dormante, les enfants et caetera. Et Titus reprend sa fortuite ascension. Ses idées ? Il faut y croire. Sa gauche ? Fais-moi rêver, chéri. Fais-moi encore rêver dans mes étirements nocturnes.

Bérénice est calme. Bérénice est guerrière.

Bérénice, frénésie de cendres d’une vie déjà violente, de choix irrémissibles, Bérénice déjà mère déjà putain, comme les femmes presque toutes les femmes, laisse se poursuivre le destin de l’Autre, laisse couler c’est une valse, parce que l’Autre nous grandit. Non ? L’autre nous fomente, nous modèle, c’est d’accord de s’estomper, parce qu’il n’y a pas que dans les livres qu’on s’abandonne, la vie aussi s’écrit, Titus. Alors Bérénice accompagne, arrange, assaisonne, assassine. Bérénice existe. Titus est suivi d’une ombre, qui amuse et embête. Et pourquoi pas. Elle est là, Bérénice, reine du Sabbat. Il faut bien que les magazines aient des sujets de couverture, et quand la souveraine est belle, que demande le peuple ?

Le maire-député-secrétaire-de-parti, oint de la défroque ad hoc, sort enfin des tranchées obliques au moment où soudain - grand art et prestidigitation, son rival évident se prend un trottoir. Pas un mince trottoir, garçon, plus que cela, un autobus sans conducteur sur le périph’. Accusé de viol, qui dit mieux.

Alors Titus s’impose sans grincer, s’impose sans couleur fauve, il se coule dans les entournures, parce qu’il dit vrai. Parce qu’il parle et que le peuple a besoin de mots, parfois plus que de pain, damn. Et de projets. Projette-moi. Projette-moi dans une échappée infrangible, fais-moi rêver des rêves des gens sans amour. Le peuple veut juste mettre son pantalon encore droit à la fin du mois, pour que ses enfants ne voient pas les plis dégueulasses. Pas trop.

Bérénice n’avait pas prévu le coup. Son affaire d’amour, qui se transforme en parchemin de Nation. L’Histoire-grand H s’invite dans l’intime. Qui peut accepter cela sans se trouer le cœur avec les clous des mesquins ? Mais Bérénice est une reine, elle a la grandeur des âmes qui s’abrogent. Je te rendrai fière de moi, disent les chansons populaires. On harmonise.

Le maire-député-secrétaire-de-parti se lance dans le jeu, la chasse, la soupe aphrodisiaque, on parle de présidence, baby, fais-moi l’amour. Encore, encore.

Et il y est, le terrien aux coutures simples et impeccables, en tête des sondages, ça passe. Ça glisse bien dans les bonnes marges. Les Français mettent leur petit manteau pour se rendre aux urnes. Ce n’était pas le scénario, mais qui prévoit vraiment la vie, Aphrodite ?

Titus est élu.

Titus est président. Le président de la République des Françaises et des Français.

Titus, c’est un beau nom pour un président. Parce que l’image, ami, fait le travail. Et l’Histoire jugera et rejouera les choix. Le peuple veut du symbole, le peuple est dans l’immédiat parce que l’on ne meurt que dans l’immédiateté. Et le peuple saigne. Alors AVANTI POPOLO.

Bérénice ne sait plus comment s’habiller. C’est ce que l’on demande à une femme, non, de savoir orner le moment viscéral ? Alors on coiffe, on poudre, on dresse. Parce que pour toi Titus, pour toute notre histoire et nos aléas des diables imprévus, je peux bien faire un brushing très correct le moment venu.

Titus est élu. Les urnes ont éructé. On veut de la gauche. On caresse un social au service du capital ; avant la mort, donne-nous des barricades échaudées et en trompe-l’oeil, comme les plafonds sublimes des églises qui s’évertuent à se prétendre être le ciel même.

Guillotine et dialogue historique :

- Ce soir Titus, tu ne t’appartiens plus. Ce soir, la nation te demande de t’oublier un moment pour toujours. Il n’y a plus de nuit dans ton emploi du temps, il n’y a plus que des urgences. Tu n’es plus un homme, tu es président. L’étreinte est terminée.

- Bérénice, les mots sont trop grands. Je serai président dans une heure, sur scène, et là, tout de suite, avant le déguisement de ciment, je ne peux ignorer l’homme, et l’homme te voit, Bérénice. Et autour rien ne s’éternise. Amour, tu es étrangère à mon destin. Tu ne fais pas partie du tableau d’origine.

- Titus, qui définit l’origine ? Quel bord est décideur des origines ?
Mais il ne s’agit plus de vivre,
es-tu à la hauteur du théâtre ?

- Encore une fois, je veux te serrer avant d’être président. Te serrer dans mes bras, simplement contre mon thorax, l’endroit où je respire ; parce que je suis en apnée. Parce que personne n’est prêt à être président. On n’est pas prêt. On ne défaille pas. Et on porte. Bérénice, tu es trop intelligente pour le costume.

- Vas-y, porte-le. Mon ange.
Et ne donne point un cœur qu’on ne peut recevoir.

Dixième élection de la Cinquième République. Avril. Il fait doux. Découvre-toi. Dix-huit millions d’électeurs. Tu n’as jamais été ministre, who cares, tu vas diriger la France. Tu es maître de l’anaphore, Moi, président.

C’est la fête au village, flonflons en terre de cœur, on mange du pâté sur le pain recuit, on danse sur des airs aux jeunesses maquillées, la vie en rose. De quelle couleur, Titus, la vie est coloriée avec toi ? Je suis une femme, je m’apprête aux couleurs survenantes, si tu les fais chanter. Balance le son.

Des yeux qui font baisser les miens
un rire qui se perd sur sa bouche
voilà le portrait sans retouches
de l’homme auquel j’appartiens.

Tu veux du populaire, prends. Les hommes le chantent depuis mille ans, les sourires, plein de dents. Eux.

Après la terre, il faut gagner la capitale à toute allure. Direction Paris. Les voitures présidentielles à mille kilomètres-heure sur l’autoroute, en haie d’honneur rugissante du nouveau couronné.

Bastille, la foule veut du corps. Toute la délégation attend, le doigt sur la couture du pantalon. Les drapeaux prêts à sortir des doublures des vestes re-lavées. Le peuple rugit. La garde s’aligne. C’est à toi. La Nation t’attend, mon tendre. La Nation espère.

Chorégraphie, klaxons, fanions tricolores ressuscités, liesse sans hasard, on y va. On traverse le Rubicon.

Et moi Bérénice ?

Je suis d’accord pour mettre mon corps en apesanteur, en petit point-virgule, parce que la vie dépasse la fiction. Parce qu’être une femme pour toi, c’est mettre mon aura en sourdine, c’est abandonner la fillette, la petite, et puis la femme, que j’ai été. C’est oublier celle qui parvient, qui arrive à la capitale, qui obtient des numéros de téléphone de magiciens, de journalistes aguerris, qui apprend à être reine des banquises, invente un genre de marquise, quand toute la nature crie à la chaleur, quand toute la nature cherche son singe en hiver. C’est le jeu, et jeu, fait roulette, poker, banqueroute et bingo. Je suis BÉRÉNICE !

Bastille, tu es sur scène, la foule chante, la foule désire, la foule sue, les gardiens sont au garde-à-vous, tout se joue, mon amour, je n’ai plus de place, je ne sais où envahir les bonnes doublures. Je suis sur une composition noire, j’ai suivi, j’ai subi, j’ai enjolivé. Maintenant, où mettre mon corps, la foule se fait meurtre, la foule est écran, et que l’amour, que l’amour, souviens-t-en ? Je suis coiffée et dressée et épilée par ton braquage. Je suis une silhouette. Où dois-je me placer ?

Bérénice, folle, libre, viole le protocole. La loi est dure mais c’est la loi ? Eh bien, moi, je danse dessus.

Bérénice s’avance vers Titus, et de ses lèvres, devant la Marseillaise, au-dessus même de la Marseillaise, allons enfants de la patrie le jour de gloire est arrivé, demande un baiser. Que veut cette horde d’esclaves, de traîtres, de rois conjurés ?

Donne-moi un baiser ! Imprécation, prière et serment pour les spectres sans agenda.

Titus, rien ne demeure que toi et moi, tes lèvres, ton corps, nos heures, embrasse-moi, une seconde, ce qui n’existe plus, cette langueur qui n’accepte aucune raison d’Etat. Cette toute petite sueur au-dessus de ta bouche, je la sens, tu restes un corps même en devenant ce soir un astre à crédit qui fait s’agenouiller le monde, embrasse-moi.

Et Titus embrasse Bérénice.

Acmé.
Le lendemain, le peuple se soulève. Fureur et commentaires.
Pour un baiser.
Dansons la carmagnole.
Et toi maintenant, embrasse-moi. Et tais-toi.
Vive le son du canon.    

Réglé comme du papier à musique

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Entretien avec le service de la copie

11 min

Réglé comme du papier à musique

Par Marion Mirande

À l’Opéra, il revient au chef de coordonner les interprètes et l’orchestre. Mais qu’en serait-il si chanteurs et instrumentistes travaillaient sur des partitions différentes ? Derrière cette harmonie se cache le service de la copie dont les tâches sont aussi insoupçonnées qu’importantes pour la maison. Francis Raynal, chef du service, et Fabrice Larrère, copiste, nous expliquent les fondamentaux de leur métier qui sont également ceux d’une production réussie.


Bien qu’essentiel au sein de l’Opéra, le rôle de votre service reste méconnu. Quel est-il précisément ?

Francis Raynal : Nous sommes en charge des matériels musicaux. Nous préparons les partitions pour l’ensemble des personnes associées aux productions, qu’il s’agisse des solistes, des artistes du Chœur, de l’Orchestre ou des régisseurs qui conduisent le spectacle.

Fabrice Larrere : Notre souci premier est de fournir à l’Orchestre des partitions très propres. Nos musiciens sont des lecteurs hors pair, mais encore faut-il qu’ils puissent déchiffrer facilement. Il arrive parfois que l’on récupère des matériels d’orchestre provenant de maisons d’édition qui posent des problèmes de lecture. Nous essayons alors de clarifier les choses en utilisant, par exemple pour les cordes, différentes couleurs pour indiquer ce qui est joué arco ou pizzicato1. Nous cherchons en permanence des solutions pour améliorer leur confort de travail.

FR : Depuis que l’Opéra a été fondé, ses copistes ont toujours été considérés parmi les meilleurs. Et grâce à l’implication totale de ceux d’aujourd’hui, tous très bons musiciens, cette tradition d’excellence peut perdurer. Car contrairement à des maisons plus modestes où la régie d’orchestre, les dispositifs musicaux et la copie peuvent être fondus en un même service, le nôtre est entièrement dédié à sa mission.

De quelle technologie disposez-vous pour garantir ce professionnalisme ?

F.R. : L’évolution du métier s’est faite en parallèle à celle de la technique. Lorsque j’ai intégré la Maison, il y a 15 ans, on travaillait au crayon. Ce n’est quasiment plus le cas. Du temps où la photocopie n’existait pas, le seul moyen de dupliquer une partition était de la réécrire. S’il y avait 9 violons, les copistes écrivaient 9 partitions. L’arrivée des photocopieurs puis celle des scanners, des logiciels de gravure musicale ainsi que de retouches d’image permettant de modifier les partitions ont fait avancer le métier. Les risques de coquilles inhérents à la reproduction manuelle se sont du coup amoindris. Toutes les partitions que nous touchons sont numérisées ; ce qui nous permet de garder une trace de notre travail. À cet effet, nous avons un pôle de fabrication intégré au service qui a une véritable fonction de reprographie.

Il est un paramètre que peu de spectateurs ont à l’esprit lorsqu’ils assistent à une représentation : la partition jouée par l’Orchestre est louée par l’Opéra.

F.L. : Oui, l’utilisation des matériels d’orchestre est soumise à un certain nombre de règles. Une fois que le chef nous a indiqué la version de l’œuvre qu’il souhaite diriger, la première étape consiste à s’assurer qu’on puisse la jouer sur le sol français. On cherche dans un second temps à identifier s’il en existe plusieurs. Une version traditionnelle ne génèrera pas de droits d’auteur – à condition bien sûr qu’elle soit dans le domaine public –, contrairement à une version révisée ou édition critique. Une version révisée est le fruit d’un travail réalisé par un musicologue qui peut être, parfois, une astuce pour les éditeurs de prolonger des droits. Mais elle peut aussi s’avérer pertinente et devenir une référence incontournable. On regarde ensuite si l’on possède notre propre matériel – ce qui ne nous exempte pas de payer des droits si tel est le cas. Par « notre matériel » j’entends les réglages faits sur des partitions d’opéras du répertoire fréquemment joués, comme Tosca ou Traviata. Deux des plus grands fonds de bibliothèques – situés à Milan et Londres – louant leurs matériels à différentes maisons, il est plus que probable qu’en récupérant une partition X années après l’avoir louée une première fois, elle ait été annotée, modifiée par d’autres personnes. Principalement pour le confort des instrumentistes, il nous a fallu mettre en place des techniques pour conserver le fruit de leur travail et le nôtre, en numérisant toutes nos interventions sur les partitions, afin de pouvoir créer nos matériels propres.

F.R. : Lorsque nous possédons notre propre matériel, nous cherchons évidemment en priorité à le proposer au chef d’orchestre, mais certains d’entre eux peuvent exiger une version précise et imposer leur matériel que nous devrons alors nous procurer. Dans d’autres cas, nous pouvons soit en demander un nouveau auprès de l’éditeur afin de le mettre à leur goût, soit adapter le nôtre en fonction du leur.    
Fabrice Larrère, bibliothécaire-copiste à l’Opéra
Fabrice Larrère, bibliothécaire-copiste à l’Opéra © Elena Bauer / OnP

Une fois les matériels en votre possession, comment intervenez-vous dessus ?

F.R. : Nous travaillons d’abord sur la structure. C’est-à-dire la liste des mesures coupées et des inserts voulus par le chef et le metteur en scène. Une fois la structure définie, nous pouvons établir le piano-chant. Il s’agit de la partition soumise au chanteur lorsqu’on lui propose un rôle et, dans le cas où il l’accepte, son outil de travail. L’apprentissage des solistes est long. Le piano-chant est donc le premier matériel à fournir. Puis nous préparons les partitions des artistes du Chœur qui peuvent étudier jusqu’à un an avant le début d’une production. Puis vient le travail sur la partition du chef d’orchestre. Les réglages définitifs pour l’Orchestre n’ayant pas d’incidence avant la première lecture, leurs matériels sont réalisés en dernier. Pour les cordes, la mention des coups d’archets, tirés ou poussés2, est primordiale. Ces indications nous sont données par le chef qui peut imposer ses choix ou décider avec le violon solo. Philippe Jordan, par exemple, propose régulièrement des coups d’archets propres au travail qu’il a pu réaliser avec d’autres orchestres.

Quelle est votre fonction lors des répétitions ?

F.L. : On doit être en mesure de prendre en compte tous les changements souhaités par le chef. Lorsqu’il dirige, Philippe Jordan demande qu’on soit présents durant toute la durée de la séance de travail et ce jusqu’à ce qu’il ait joué la partition en entier. Selon la longueur de l’œuvre, cela peut correspondre à trois ou quatre lectures. En suivant sur une partition identique à la sienne, où figure tout l’orchestre, je prends note de ses indications. A la fin du service, je récupère les partitions des musiciens afin d’y reporter, si besoin, des annotations spécifiques identifiées lors de la répétition. Sur certaines productions où il y a beaucoup de coupures, notre présence est indispensable. Nous ne sommes jamais à l’abri d’un oubli ou d’une mauvaise interprétation de nos annotations par les musiciens.

F.R. : La présence du bibliothécaire auprès de l’Orchestre lors des répétitions assure une sécurité. Il sait précisément où il est intervenu et ce qu’il aura à modifier en cas de besoin. Souvent, lorsque le chef répète avec l’Orchestre, son assistant travaille auprès des chanteurs et ne peut récupérer ses corrections. En cas de changement de chef, le copiste est alors en mesure de fournir au nouvel arrivant un matériel sur lequel ont été reportées toutes les modifications voulues par son confrère.     
© Elena Bauer / OnP

Vous êtes également responsables de l’homogénéité des matériels pour l’ensemble des personnes associées à une production.

F.R. : L’homogénéisation de la structure est essentielle. Il faut veiller à ce que le Chœur, l’Orchestre, les régisseurs aient sur leur partition les mêmes réglages. Lors des répétitions, tout le monde doit être en mesure de reprendre au même endroit quand le chef indique un numéro.

F.L. : La partition du chef peut avoir des chiffres repères différents des chiffrages de mesure du piano-chant. On doit alors homogénéiser les matériels, soit en indiquant les deux chiffrages sur tous les documents, soit – option qui reste la plus simple – en faisant le report seulement sur la partition du maestro. C’est un travail de longue haleine qu’il est important de régler avant les répétitions.
    

Dans le cadre d’une création, en quoi consiste votre travail ?

F.R. : Le plus délicat avec une création est qu’on ne sait jamais quand le compositeur va terminer son œuvre et quand l’éditeur pourra transmettre la partition gravée. Dans le cas présent de Bérénice3, le timing est plutôt confortable, ce qui n’est pas toujours le cas. La partition a été reçue cinq mois avant la première lecture d’orchestre ; ce qui doit permettre aux musiciens de la travailler pendant les vacances. De notre côté, aucun travail n’a pour l’instant été fait dessus, nous nous sommes contentés de la réceptionner. Elle est prête à l’emploi.

F.L. : Ensuite, il se pourrait qu’elle ne corresponde pas exactement à ce que le compositeur souhaitait et qu’il la fasse évoluer au fil des répétitions. Ou qu’il réalise que des erreurs se sont glissées au moment de la gravure. Dans ces cas-là, elle ne repartira pas chez l’éditeur. Nous interviendrons directement dessus et apporterons les changements. Par ailleurs, les partitions livrées sont pour l’instant vierges de toute indication, comme les coups d’archets. Ils pourraient être décidés au pupitre lors des lectures avec le chef. Là encore, il sera de notre devoir de les reporter.

De quelle liberté de réécriture dispose-t-on avec une partition éditée ?

F.L. : Pour Boris Godounov, le chef d’orchestre, Vladimir Jurowski, avait exigé une édition critique de la version de 1869 qu’il avait déjà dirigée en concert. À son arrivée à Bastille, ayant pointé énormément de fautes d’édition sur ce matériel, et ayant une conception très personnelle de l’œuvre, il a décidé de retravailler l’orchestration. Il ne s’agissait pas seulement de changer des nuances mais bien de réécrire la partition en fonction de ses souhaits : faire jouer à tel endroit la partie du quatrième cor par le troisième trombone, réintroduire le tuba dans des passages où il était absent… Notre implication a ici largement dépassé nos fonctions premières, et les changements ont duré jusqu’aux représentations. Nous avons réalisé un vrai travail éditorial durant toute la production, au jour le jour ; il a été largement influencé par ce que le chef entendait quotidiennement en répétition.
    

À quels autres types d’imprévus êtes-vous amenés à répondre ?

F.L. : Récemment lors du Trouvère, l’air Di quella pira était chanté soit dans le ton original soit dans le ton transposé, selon les souhaits des ténors distribués. La transposition4 ne figurant pas sur la partition originale, j’ai dû l’écrire. Pour éviter que les musiciens ne jonglent avec plusieurs partitions, j’ai mentionné les deux versions sur la même, et en frontispice les dates avec les noms des interprètes correspondants. Le soir, en arrivant à leur pupitre, les musiciens savaient ainsi à quelle portée se référer. Il nous revient de trouver ce type de solutions pratiques. Comme de nous renseigner sur les changements de casting de dernière minute qui peuvent avoir un impact sur l’Orchestre. L’anticipation est une qualité essentielle pour exercer ce métier.


1. Arco signifie que les notes sont frottées par l’archet, pizzicato qu’elles sont pincées à la main.
2. Il s’agit d’indiquer la direction à donner à l’archet. Le mouvement allant du talon à la pointe est dit « tiré », celui allant de la pointe au talon est dit « poussé ». 
3. Entretien réalisé au mois de juillet.
4. La transposition consiste à élever ou abaisser la hauteur des sons.

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  • Bérénice (Saison 18/19)- Barbara Hannigan , Bo Skovhus

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Place de l'Opéra

75009 Paris

Transports en commun

Métro Opéra (lignes 3, 7 et 8), Chaussée d’Antin (lignes 7 et 9), Madeleine (lignes 8 et 14), Auber (RER A)

Bus 20, 21, 27, 29, 32, 45, 52, 66, 68, 95, N15, N16

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Q-Park Edouard VII16 16, rue Bruno Coquatrix 75009 Paris

Réservez votre place

Au Palais Garnier, des places à 10 € en 6e catégorie (visibilité très réduite, deux places maximum par personne) sont en vente le jour de la représentation aux guichets du Palais Garnier.

Dans les deux théâtres, des places à tarifs réduits sont vendues aux guichets à partir de 30 minutes avant la représentation :

  • Places à 35 € pour les moins de 28 ans, demandeurs d’emploi (avec justificatif de moins de trois mois) et seniors de plus de 65 ans non imposables (avec justificatif de non-imposition de l’année en cours)
  • Places à 70 € pour les seniors de plus de 65 ans

Retrouvez les univers de l’opéra et du ballet dans les boutiques de l’Opéra national de Paris. Vous pourrez vous y procurer les programmes des spectacles, des livres, des enregistrements, mais aussi une large gamme de papeterie, vêtements et accessoires de mode, des bijoux et objets décoratifs, ainsi que le miel de l’Opéra.

Au Palais Garnier
  • Tous les jours, de 10h30 à 18h et jusqu’à la fin des représentations
  • Accessible depuis la place de l’Opéra ou les espaces publics du théâtre
  • Renseignements au 01 53 43 03 97

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