Iphigénie en Tauride - Opéra - Programmation Saison 16/17 - Opéra national de Paris

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    Iphigénie en Tauride

    Christoph Willibald Gluck

    Palais Garnier - du 02 au 25 décembre 2016

    Guergana Damianova/OnP

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Iphigénie en Tauride

Palais Garnier - du 02 au 25 décembre 2016

Opéra

Iphigénie en Tauride

Christoph Willibald Gluck

Palais Garnier - du 02 au 25 décembre 2016

2h20 avec 1 entracte

Langue : Français

À propos

En quelques mots :

« Le calme reparaît, mais au fond de mon cœur, Hélas ! L’orage habite encore. »  

Iphigénie, Acte I


Pour honorer la prédiction d’un oracle, Iphigénie doit tuer tout étranger s’échouant sur les rivages de Tauride. Las, c’est son frère Oreste qui accoste, assassin de leur mère Clytemnestre, qu’il a tuée pour venger le meurtre de leur père Agamemnon : telle est la lignée maudite des Atrides qui répète la mort de génération en génération… Cette chaîne de crimes héréditaires passera-t-elle par Iphigénie ? En 1779, Gluck composait avec Iphigénie en Tauride une musique qui semblait faire naître une émotion nouvelle – ni tout à fait théâtrale ni tout à fait lyrique – dans laquelle ses contemporains crurent voir la tragédie grecque enfin ressuscitée. Au réformateur de l’art lyrique répond un grand réformateur du théâtre. En 2006, les spectateurs qui poussaient les portes du Palais Garnier étaient accueillis par les silhouettes immobiles des interprètes qui les attendaient sur scène, et semblaient leur tendre une forme de miroir dérangeant. Le Polonais Krzysztof Warlikowski signait sa première mise en scène pour l’Opéra de Paris avec cette « Iphigénie » bouleversante, où les personnages au crépuscule de leur existence n’en finissent pas d’être hantés par leur passé.

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Iphigénie en Tauride - Christoph Willibald Gluck

— Par En partenariat avec France Musique

Coulisses

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Krzysztof Warlikowski dans les images du cinéma et de ses fantômes

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Krzysztof Warlikowski dans les images du cinéma et de ses fantômes

Regard sur Iphigénie en Tauride

05’

Par BANDE A PART, Jo Fishley

La production de Krzysztof Warlikowski d'Iphigénie en Tauride de Gluck revient à l'Opéra de Paris, sous la direction de Bertrand de Billy. Tragédie familiale aux accents contemporains, écrite d’après Guymond de La Touche et d’après Euripide, cette Iphigénie, condamnée à tuer son frère Oreste, lui-même meurtrier, s’enfonce dans le labyrinthe d’un cauchemar très cinématographique.

« Tous les films sont des rêves, certains un peu plus que d’autres ». Les nuits troublées du cinéma selon David Lynch rejoignent les soirs sombres du théâtre de Krzysztof Warlikowski. Ses œuvres se jouent dans de semblables profondeurs oniriques et fantasmées, pour mettre en scène une vision éclairée du monde, un songe sidéré et pessimiste, l’œil ouvert sur la nuit de la condition humaine et la perte de l’innocence. D’inquiétantes étrangetés jettent leurs ombres, comme sous la menace obscure que quelque chose va advenir d’un réel caché, mystérieux, inexplicable. L’Iphigénie de son opéra, diva chancelante dans ses vieux jours, recluse dans un hospice carrelé à la clinicité dure et roide, est telle la Diane lynchienne de Mulholland Drive : elle surgit du réel impossible et de sa farce macabre, elle rêve, elle est dans la réminiscence, le ressassement introspectif d’une existence, la remontée de souvenirs et d’oublis. Les traces d’une absence et la mémoire du passé s’installent au cœur de la fiction contemporaine de cette Iphigénie torturée, vacillante, confuse. Le temps perdu se retrouve en flash-back. Des portes s’ouvrent et se ferment sur un vertige fictionnel qui ne mène sans doute nulle part ailleurs qu’à une impasse existentielle.

© Franck Ferville / OnP
Dans le miroir brisé des apparences et des illusions, le cinéaste Lynch et le metteur en scène Warlikowski finissent par faire surgir la folie des hommes, leur monstruosité sous les visages lisses. L’horreur n’est jamais très loin dans les rêves et cauchemars lynchiens, aux scénarios labyrinthiques tracés suivant un dédale mental, sur des territoires où le normal s’altère, bizarre et angoissant. Dans le noir des salles, Lynch et Warlikowski cadrent une modernité tragique éprouvant les questions de vie et de mort. Nous voilà assis face à ce que nous sommes, en perpétuelle construction déconstruction. Sur la scène, sur l’écran, nous nous reconnaissons, nous sommes les personnages, nos doubles. Des miroirs descendent sur le plateau d’Iphigénie en Tauride, où se reflètent la scène et la salle même : dans ces glaces, Warlikowski ne laisse pas le spectateur seul, il le met face à lui-même, les yeux dans les yeux de son spectacle spéculaire, de sa propre image, son omniprésence révélée. Nous regardons les images qui nous regardent. Nous vivons avec des fantômes et leur altérité, telle Iphigénie qui se dédouble, jeune et vieille, cohabitant avec elle-même sur la scène, empire de sa ressemblance.   
L’Affaire Makropoulos, Opéra Bastille, 2013
L’Affaire Makropoulos, Opéra Bastille, 2013 © Mirco Maggliocca / OnP

Sombre et déroutant, Krzysztof Warlikowski aliène le théâtre avec le cinéma et ses spectres. Des vieilles femmes éternelles arpentent l’hospice où son Iphigénie se meurt, survivante du cauchemar familial ; elles avancent comme des zombies muets, des mortes vivantes. Les fantômes reviennent toujours, dont il a convoqué à nouveau la présence dans le chœur muet de jeunes femmes de son Triomphe du temps et de la désillusion, l’oratorio de jeunesse de Haendel qu’il a logé dans un décor de salle de cinéma, comme il en avait déjà monté les fauteuils dans la scénographie de L’Affaire Makropoulos.

Le metteur en scène polonais emplit son théâtre d’images, déportant la narration dans une sorte d’annexe ouverte à l’espace mental, un labyrinthe intérieur en rhizome, aux dimensions multiples. Dans le huis clos nocturnal de l’hospice d’Iphigénie, qui tout aussi bien pourrait être un asile psychiatrique pour décadents séniles, des vidéos projettent la vision de la tragédie sanglante. Il n’y a pas ici de film, mais ces images s’inscrivent dans le travail formellement syncrétique de Krzysztof Warlikowski. Il colle, il assemble, il découpe, il cite, il extrait, dans une forme de collage qui s’apparente au montage cinématographique, l’ordonnancement d’un récit. Il emprunte, il juxtapose, il jette des ponts dans une hybridation, une translation poétique. Il altère et il recrée.
Barbara Hannigan (Elle), La Voix Humaine, Palais Garnier, 2015
Barbara Hannigan (Elle), La Voix Humaine, Palais Garnier, 2015 © Bernd Uhlig / OnP

Krzysztof Warlikowski n’est pas simplement un metteur en scène sous influence lynchienne, jusque dans sa stylisation et son esthétique qui convoquent un héritage pictural puisant chez Hopper et Bacon. Il n’est pas si loin de Bergman, dans la combinaison de l’onirisme, du lyrisme et du symbolisme. La cinéphilie entre en jeu dans sa fabrique protéiforme. Les spectacles du metteur en scène polonais agrègent régulièrement des morceaux de films. Dans Cabaret de Varsovie, Shortbus de John Cameron Mitchell. Dans Parsifal, Roberto Rossellini pour Allemagne année zéro. Dans Le Triomphe du temps et de la désillusion, un extrait du film de Ken McMullen Ghost Dance. Des séquences de L’Année dernière à Marienbad de Resnais en prélude à La Femme sans ombre.

Tout un mouvement de décentrement déplace la narration et la perception au théâtre de Warlikowski. Mais pourquoi diable l’a-t-on casé ? Enfant terrible ? Provocateur ? Expérimentateur ? Le créateur crée, et Warlikowski déborde ces clichés limitatifs.    
Un ténor dans l'air du temps

05:14’

Vidéo

Un ténor dans l'air du temps

Entretien avec Stanislas de Barbeyrac

Par Marion Mirande

Mélodiste le temps d’un récital à l’Amphithéâtre Bastille, interprète du rôle de Pylade dans Iphigénie en Tauride mis en scène par Krzysztof Warlikowski au Palais Garnier, Stanislas de Barbeyrac est aussi, cette saison 16/17 à l'Opéra de Paris, Tamino dans La Flûte enchantée. L’occasion pour lui de retrouver, après Tannhauser en 2011 à Bastille et Les Dialogues des Carmélites en 2015 au De Nederlandse Opera d'Amsterdam, le metteur en scène Robert Carsen, et d’évoquer ces multiples projets qui le lient à notre maison.

© akg-images / De Agostini Picture

Comment Gluck a révolutionné l’opéra

Article

Comment Gluck a révolutionné l’opéra

Iphigénie en Tauride au Palais Garnier

10’

Par Charlotte Ginot-Slacik

Christoph Willibald von Gluck – dont Iphigénie en Tauride est à l’affiche du Palais Garnier – a été l’architecte de deux réformes majeures : l’opéra italien d’abord, la tragédie lyrique ensuite. Gluck suscita bien des querelles de son vivant, avant d’être adulé par la génération romantique. Portrait d’un compositeur qui a changé le visage de l’art lyrique, suivi d’un petit lexique à l’attention de tous.

Tout commence à Vienne
« Lorsque j'ai entrepris d'écrire la musique d'Alceste, j'ai décidé de renoncer à tous ces abus, dus soit à la vanité et à la mauvaise volonté des chanteurs, soit à une trop grande docilité des compositeurs qui ont trop longtemps déformé l'opéra italien et rendu aussi ridicule qu'agaçant ce qui était le plus splendide des spectacles. Je me suis efforcé de ramener la musique à son véritable rôle, qui est de servir la poésie par son expression et de suivre le déroulement de l'intrigue sans interrompre l'action ni l'étouffer sous une prolifération d'ornements inutiles. » En 1767, Gluck théorise dans la préface d’Alceste sa réforme de l’opera seria amorcée cinq ans auparavant avec Orfeo ed Euridice. Le musicien annonçait ainsi sa volonté de s’inspirer de l’opéra français afin de mettre un terme aux intrigues de pacotille, au règne d’interprètes tout puissants, à la virtuosité vocale sans élan dramatique. Dans cette rénovation de l’opéra italien, le musicien allemand fut secondé par des collaborateurs exceptionnels (Ranieri de’ Calzabigi son librettiste, Gasparo Angiolini son chorégraphe, Giovanni Maria Ouaglio son décorateur et le castrat Gaetano Guadagni).

Pour s’être intéressé à l’opéra comique, Gluck connaissait intimement les ressorts du style français. La réforme gluckiste débute avec Orfeo ed Euridice créé au Burgtheater de Vienne le 5 octobre 1762. Rompant avec l’omniprésence de l’aria da capo, Gluck et Calzabigi privilégient une virtuosité vocale issue du drame. Animés par la quête d’un chant naturel, désireux de renouveler l’artificialité de l’alternance entre récitatif (proche du discours parlé) et air (dévolu à la virtuosité), les deux créateurs complexifient les formes, en généralisant l’usage de récitatifs proches du chant, accompagnés par l’orchestre. Deuxième innovation majeure, la simplification des livrets. Dans la Vienne impériale dominaient les trames héritées de Pietro Metastasio (Métastase), poète officiel de la cour quelques trente ans plus tôt : intrigues politiques transposées dans l’univers romain, dont Métastase explore les résonances contemporaines. Gluck et Calzabigi reviennent au modèle grec antique, réduisant drastiquement le nombre de protagonistes sur scène (deux héros seulement dans Alceste !).

Je me suis efforcé de ramener la musique à son véritable rôle, qui est de servir le déroulement de l'intrigue sans l'étouffer sous une prolifération d'ornements inutiles. C.W. Gluck

Tout continue à Paris
En 1774, Gluck se rend à Paris, à l’invitation de la jeune Marie-Antoinette dont il avait été le professeur en Autriche. « Je suis sur le point d’aller à Paris pour produire l’Iphigénie en Aulide sur le grand théâtre de l’Opéra. L’entreprise est certainement hardie et les obstacles seront grands parce qu’elle doit attaquer de front des préjugés nationaux contre lesquels la raison ne suffit pas. » Les résistances auxquelles doit s’attaquer Gluck dans sa volonté de rénover la tragédie en musique sont au moins aussi puissantes qu’en Autriche : un siècle s’était écoulé depuis que Lully avait élaboré un modèle d’opéra français (Cadmus et Hermione, 1673), où la primeur était donnée à la compréhension de la langue. Régulièrement représentées après la mort du musicien, les tragédies de Lully constituent les premiers opéras « de répertoire » européen. Doté d’une connaissance des œuvres du passé, le public français possédait donc des exigences particulièrement précises envers les pièces nouvelles, dont Rameau, en son temps, avait été la victime, lui à qui l’on avait reproché de composer de manière trop complexe, en un mot trop baroque (Hippolyte et Aricie, 1733). Après avoir offert à l’opera seria une subtilité musicale et une efficacité dramatique inouïes, Gluck devait faire briller d’un éclat nouveau la tragédie française. Dans cette bataille, le musicien allemand trouva pourtant un allié de poids : le philosophe français Jean-Jacques Rousseau. « L’Iphigénie renverse toutes mes idées. Elle prouve que la langue française est aussi susceptible qu’une autre d’une musique forte, touchante et sensible. » (Jean-Jacques Rousseau le, 17 avril 1774).

Pourfendeur de Rameau, Rousseau prônait une alliance naturelle entre langue et musique, tout en reprochant à la tragédie lyrique ses artifices scéniques, son langage suranné, ses situations dramatiques conventionnelles.

C’est, une fois encore, par une réflexion inspirée des tragiques grecs que Gluck renouvelle les codes. En 1779, Iphigénie en Tauride révolutionne le genre. Ouverture où se confondent les éléments déchaînés et l’âme tourmentée de l’héroïne, rôle expressif de chœurs commentateurs et acteurs de l’action – selon les préceptes grecs –, grands sentiments communs… L’opéra selon Gluck retrouve la grandeur lullyste tout en transposant l’expression du tragique à la collectivité.

Le musicien allemand trouve pourtant sur sa voie des obstacles étrangers à la musique : « Je me laisserai difficilement persuader d’être de nouveau l’objet de la critique ou des louanges de la nation française car ils sont changeants comme des coqs rouges. » En 1776, Alceste avait ravivé la querelle franco-italienne. Quelle langue, de l’italien ou du français, est la plus propre à l’expression musicale ? À travers ce débat esthétique, l’affrontement politique latent de deux princesses (Marie-Antoinette, soutien de Gluck, et la Comtesse Du Barry, défenseuse du clan italien) et, surtout, de deux images de la France. Malgré le succès d’Iphigénie en Tauride, l’intérêt d’un musicien étranger pour la scène française reste problématique dans une nation où musique et pouvoir ont part liée. En 1908 encore, le nationaliste Claude Debussy déclare avec aigreur : « La reine Marie-Antoinette, qui ne cessa jamais d’être autrichienne, sentiment qu’on lui fit payer une fois pour toutes, imposa Gluck au goût français : et de ce coup, nos belles traditions se faussent, notre besoin de clarté se noie et, en passant par Meyerbeer, nous aboutissons très logiquement d’ailleurs à Richard Wagner. »

Le jour où il me fut enfin permis d’entendre Iphigénie en Tauride, je jurai, en sortant de l’Opéra, que je serai musicien. H. Berlioz

« Il me semble que si Gluck revenait au monde, il dirait de moi en entendant cela : « décidément, voilà mon fils ! » (Hector Berlioz). Après avoir fait de Gluck sa divinité tutélaire, Berlioz raconte dans ses mémoires : « Le jour où, après une anxieuse attente, il me fut enfin permis d’entendre Iphigénie en Tauride, je jurai, en sortant de l’Opéra, que malgré père, mère, oncles, tantes, grands-parents et amis, je serai musicien. » Souvent qualifié par le musicien français de « Shakespeare de la musique », Gluck fascine la génération romantique par sa quête d’un art musical exempt de divertissement, destiné à élever l’auditeur. L’un et l’autre, détracteurs acharnés d’un opéra italien dominé par le vedettariat des chanteurs, Berlioz et Wagner en font le premier musicien romantique. Berlioz lui rend deux hommages directs : en 1863, il réorchestre Orphée et Eurydice pour l’Opéra de Paris, adaptant à la voix de la cantatrice Pauline Viardot le rôle d’Orphée. La production est un triomphe, auquel assiste Wagner. Quelques mois plus tard, il achève Les Troyens dont la grandeur tragique et la gravité héroïque font écho au style gluckiste. Tout aussi habité par Gluck, Wagner révise Iphigénie en Aulide en 1847, puis s’inspire des chœurs du musicien allemand pour sa réforme de l’opéra. Un dernier nom émerge parmi les héritiers auto-proclamés de Gluck : celui de Franz Liszt qui, en 1864, dirige Orphée et Eurydice à Weimar. En préambule, Liszt crée un nouveau poème symphonique, Orpheus, inspiré du « point de vue touchant et sublime dans sa simplicité, avec lequel ce grand maître a envisagé son sujet ».

Puis Liszt poursuit : « Puissent du moins ne plus jamais revenir ces temps de barbarie, où les passions furieuses comme des ménades ivres et effrénées, vengent le dédain que fait l’art de leurs voluptés grossières, le font périr sous les thyrses meurtriers et leurs furies stupides. » Pour la triade Berlioz/Liszt/Wagner, Gluck fait figure de prophète. Ses deux réformes destinées à débarrasser l’opéra de traditions poussiéreuses traduisent le nouveau statut de la musique : en réfutant la dimension divertissante de l’opera seria et de la tragédie lyrique, le musicien allemand impose une écoute nouvelle, à laquelle aspirent ses trois successeurs. Nouvelle religion, l’art – et en particulier la musique – renverse les habitudes, transcende l’auditeur, en un mot : lui permet d’accéder au sublime. « Il faut quelquefois se moquer des règles, et se faire soi-même des règles pour en tirer des grands effets », prédisait Gluck dès 1775. Berlioz, Liszt et Wagner n’auraient sans doute pas mieux dit. 


Charlotte Ginot-Slacik : Après des prix d’esthétique et de culture au Conservatoire de Paris, Charlotte Ginot-Slacik a obtenu son doctorat sur les Figures de l’Espagne dans les œuvres de Luigi Dallapiccola, Bruno Maderna et Luigi Nono. Elle enseigne l’histoire de la musique et la pédagogie au CNSMD de Lyon, collabore comme dramaturge auprès de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse. Ses recherches portent en particulier sur le lien entre musique et politique au XXe siècle. 

© plainpicture/christian plochacki

Petit lexique de Gluck à l’attention de tous

Opera seria
 En français, l’ « opéra sérieux » - des personnages nobles, des intrigues opposant raison d’État et conflits amoureux, une virtuosité vocale exacerbée. Tel est, en quelques mots, l’opera seria tel que le connaissait Gluck.

Tragédie lyrique

Genre forgé par Lully, musicien attitré de Louis XIV, afin de doter la France d’un genre indépendant de l’Italie. En 1673, Lully s’inspire du théâtre de Corneille et de Racine afin d’inventer une déclamation inspirée par les spécificités de la langue française. Commanditée par la cour versaillaise, la tragédie lyrique a aussi vocation à exalter la monarchie absolue de Louis XIV en chantant les louanges du monarque.

Aria da capo

Au XVIIIe siècle, les personnages d’opéra échangent en deux temps. Le récitatif, d’abord, permet au public – qui ne dispose d’aucun surtitrage ! – de comprendre le déroulement de l’action. Puis les chanteurs déploient leur virtuosité vocale dans l’aria da capo, ainsi baptisée en raison de la reprise systématique de la première partie (da capo ou, en français, du début). Les interprètes ornementent davantage cette reprise, prouvant ainsi leur bravoure vocale.

Castrat
Dans l’Italie baroque, et en particulier à Naples, la pratique s’était répandue de castrer les jeunes garçons afin de conserver leur tessiture aiguë et de leur permettre de chanter à l’Église où le chant des femmes était proscrit. Rapidement, les castrats fascinent le monde de l’opéra par leur agilité vocale et par leur capacité à interpréter des rôles féminins autant que masculins.

Modèle grec


Gluck connaissait la tragédie antique grecque, dans laquelle le rôle du chœur est fondamental. Commentateur et acteur, le chœur est le véritable héros de la tragédie afin de provoquer chez le spectateur une réflexion politique et artistique.
En Quête de Iphigénie

Podcast

En Quête de Iphigénie

En Quête #02

01’

Par David Christoffel

Du 2 au 25 décembre Iphigénie en Tauride est à l’affiche du Palais Garnier dans la mise en scène de Krzysztof Warlikowski, qui choisit d’en transposer l’action dans une maison de retraite. Poète et créateur radiophonique, David Christoffel est parti enquêter sur les traces d’Iphigénie avec l’anthropologue Nicolas Commune et les étudiants du Master Art du spectacle de l'Université Paris 8.

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