Lorsque Mozart aborde la composition de quintettes à cordes, le genre est encore récent. C’est le compositeur Luigi Boccherini, son contemporain, qui en est le principal représentant à l’époque et le plus important promoteur, avec plus de cent numéros d’opus consacrés à cette formation. Chez Mozart, le corpus des quintettes est nettement plus restreint (six pièces), mais d’une exceptionnelle qualité. Le Quintette en sol mineur KV 516 (1787) est l’une des oeuvres les plus poignantes qu’ait composées Mozart au long de sa courte vie. Hors même la splendeur haletante de son thème principal et la mélancolie du deuxième, l’Allegro initial est d’une plasticité remarquable.

Tout sonne d’entrée de jeu comme un paysage extraordinairement inventif, baroque dans ses trajets inattendus et ses ornements, classique dans l’équilibre qu’il maintient malgré tout et clairement préromantique dans ses accents passionnels. De façon rarissime dans l’œuvre de Mozart, aucune plage de lumière ne vient éclairer la profonde douleur qui semble marquer ce quintette. Du point de vue formel, le troisième mouvement, Adagio, s’enchaîne d’ailleurs avec un nouveau mouvement lent en introduction au finale, ce qui accentue encore le caractère dépressif de l’ensemble.

Le Quintette op. 111 de Brahms présente des textures instrumentales plus denses que celui de Mozart, le chant y est plus explicite (merveilleux duos « vocaux » entre les instruments). œuvre d’un compositeur au faîte de son art, le quintette sonne dans l’aisance et la souplesse d’une pièce travaillant les effets de clair-obscur et la jubilation du mouvement et suggérant la juvénilité réacquise d’un compositeur d’âge mûr… Le mouvement lent est l’un de ces moments de grâce dans l’œuvre de Brahms – paix et mélancolie, échos d’une Mitteleuropa rêvée, splendeur des lignes mélodiques et ferveur omniprésente. C’est également un voyage vers les terres hongroises qui apparaît dans les deux derniers mouvements, sur un mode alternativement rêveur ou jubilatoire, faisant éclore des séquences mélancoliques et la présence tonifiante du rythme – ancré chez Brahms dans la fièvre et le pathos des danses d’ Europe centrale.