IV. De la danse au geste dansé

IV. De la danse au geste dansé

Amateur de bals populaires et de fêtes mondaines, Picasso a dansé toute sa vie. Sur certains clichés, on le voit, amusé, tenter un levé de jambe maladroit en pleine rue, ou ébaucher un pas de danse en compagnie de Jacqueline Roque, sa dernière égérie. Pour autant, cette affinité avec le mouvement dansé peut-elle avoir influencé sa pratique artistique ?
La série de photographies réalisée par Gjon Mili pour le magazine Life en août 1949 apporte quelques éléments de réponse. À l’aide d’un crayon lumineux, Mili invite Picasso à exécuter des dessins immatériels. Constitué d’une ligne ininterrompue de lumière, chaque motif est fixé sur la pellicule grâce à une durée d’exposition très longue. Parfois, une succession de flashs permet de capturer différents états de la gestuelle de l’artiste : son corps apparaît tourné dans plusieurs directions à la fois, à la façon d’un tableau cubiste.
Cette technique du trait continu, Picasso l’a expérimentée dès la fin des années 1900 : la pointe du crayon se pose sur le papier et ne le quitte qu’une fois le dessin achevé. Entre 1917 et 1924, l’artiste s’en sert de nouveau, aboutissant au « style curvilinéaire » de Mercure. Mais la proposition de Mili implique une nouveauté de taille : cette fois, le tracé s’épanouit dans un espace à trois dimensions. Mouvements amples des bras, extension maximale, le corps de Picasso semble se projeter dans une sphère pour déployer une imagerie en volume. Son geste devient, en quelque sorte et pour un bref instant, un geste de danseur, immortalisé par l’œuvre photographique, comme une esquisse de notation chorégraphique.  

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