Partie III

Partie III

Les arts décoratifs

Partie III

Le succès de Léon Bakst à la scène suscite une mode qui se déploie jusque dans les appartements, les tentures et les coussins. Marcel Proust s’en fait l’écho lorsqu’il évoque l’intérieur du comte Charles de Polignac dans À la recherche du temps perdu. Sensible aux arts décoratifs dès sa jeunesse, Bakst intègre leur logique à toutes ses créations, qu’elles soient picturales ou appliquées, et n’hésite pas à collaborer avec le parfumeur François Coty ou le maître-verrier et grand bijoutier René Lalique.

La richesse chromatique de sa palette et son goût du détail ornemental créent un style inédit en constant renouvellement qui synthétise les avancées de son époque et les recherches qu’il fait pour les spectacles auxquels son nom est associé. Ainsi, hanté par sa rencontre avec Piotr Tchaïkovski à l’occasion de la création de La Belle au bois dormant en 1890, Bakst ne cesse-t-il de revisiter le conte de Perrault. Il le porte à la scène à New York, Londres et Paris et l’illustre sur les panneaux décoratifs la demeure londonienne de James de Rothschild. En 1921, l’écharpe avec laquelle la danseuse Caryathis - la future Elise Jouhandeau - joue sur l’affiche qu’il crée pour un spectacle d’Erik Satie résume l’esthétique de ses dessins représentant les bacchantes de Narcisse et Nijinski dans L’Après-midi d’un faune.


La mondanité et la mode

Dès 1889, Bakst, alors âgé de 23 ans, est introduit dans la société aristocratique de la Russie impériale. L’un de ses premiers élèves et mécènes, le comte Dimitri Benckendorff, le présente au grand duc Vladimir Alexandrovitch, président de l’Académie impériale des Beaux-Arts et frère du Tsar Alexandre III. Plus tard, Bakst monte des spectacles à Saint-Pétersbourg pour le Tsar Nicolas II et son épouse.

En France, à partir de 1909, Bakst fréquente Robert de Montesquiou, l’arbitre des élégances parisiennes, qui compose des poèmes sur lui. Il devient un familier des salons du Faubourg Saint-Germain où se retrouvent la comtesse Greffulhe, Misia Sert ou la marquise Casati. Il décore l’intérieur de celles qui deviennent ses principales commanditaires et, à l’occasion, les dessine et les peint. Son art du portrait, parfois alimentaire, panache toujours réalisme et stylisation.

À la même époque, le travail de Bakst pour la scène influence des couturiers comme Paul Poiret, tandis que d’autres créateurs de mode font directement appel à lui. Ainsi, donne-t-il à Jeanne Paquin une collection intitulée « Fantaisies sur le costume moderne ». Bakst se fait encore « théoricien » lorsque les journaux, comme Vogue, lui demandent son avis sur les tendances de la mode féminine. Il imagine enfin, à l’usage de la marquise Casati, des tenues excentriques ou spectaculaires pour des bals à thème, et pour Misia Sert, des modèles de chapeaux pour la vie ordinaire.          

Influence et postérité

Dès les années 1910, le style Bakst fait école à Paris, Londres, Monte-Carlo ou New York. Comme l’écrit Jean Cocteau : « Le triomphe de Léon Bakst vint balayer nos scènes et substituer à la poussière grise une poussière nouvelle, poussière d’or et de vives couleurs. »

Bakst est imité, parfois jusqu’à la parodie, par George Barbier, Joseph Pinchon, Maxime Dethomas et Jean-Gabriel Domergue qui travaillent dans son sillage, à l’Odéon, à l’Apollo ou à l’Opéra. L’artiste ne manque pas de s’en plaindre amèrement dans sa correspondance.

Par ailleurs, Bakst a un atelier et des élèves auxquels il apprend, comme le rapporte son disciple Marc Chagall, la nécessité de ne pas le copier et d’être d’abord eux-mêmes. Parmi eux, le metteur en scène et décorateur André Barsacq, et André Bakst, son fils, qui a travaillé pour le théâtre et le cinéma.

L’influence de Bakst se fait encore sentir dans le milieu de la haute couture et continue, jusqu’à nos jours, à inspirer les artistes les plus divers : Yves Saint Laurent, mais aussi Christian Lacroix, John Galliano pour Dior ou Karl Lagerfeld pour Chloé, lui ont rendu hommage à travers leurs créations.

Pour avoir lui-même puisé au plus près de sources archaïques qu’il a su s’approprier, le génie de Bakst a saisi, à travers des œuvres éphémères, non pas la mode, mais l’indémodable.


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